Force et Esprit
« […] Après sa toilette matinale à l’eau glacée d’une source captée plus haut dans la forêt, il s’adonne à la cueillette de baies, de plantes, chasse au sabre le daim ou le sanglier, gibier dont il ne dédaigne pas la chair mais prend soin de ne jamais les faire souffrir. Ou alors il ramasse du bois et des écorces qu’il utilise pour réparer son ermitage. S’il pêche volontiers, il ne pratique pas la culture des terres. Parfois, il s’en va dans la montagne pour de longues expéditions qui exercent à la fois le corps et l’esprit, recueillir dans la montagne graines, fleurs, fruits, écorces, racines, dont il extrait des matières tinctoriales par dessiccation, broyage, distillation ou fermentation, selon des procédés traditionnels ou originaux tenus secrets. Les couleurs mélangent souvent des bruns, des roux, des violets, mais aussi des gris, des bleus, rappelant les champs, les rizières, les rochers, le bois, l’eau et le ciel. Il en va de même des pinceaux, taillant un manche de bois adapté à sa main et jusqu’à la composition de la mèche, provenant de différents animaux : cheval, sanglier, cerf, blaireau, renard, ainsi que le papier 100% végétal qu’il fait sécher au vent, le soumettant au clair de lune ou à l’éclat de la neige. La valeur symbolique du mélange est importante aussi puisque l’âme des animaux demeure active dans l’objet. Même sous des trombes d’eau, Akeji se plonge chaque soir dans sa baignoire : une marmite en fonte bordant sa cabane, accrochée aux flancs du mont Kuramayama. Le savon dans une main, le parapluie dans l’autre. Et puis, dans une solitude que peuplent la voix du vent dans les cèdres ou le fouinement de quelque bête en quête de proie, il travaille à ses œuvres en suivant de son auvent le jeu de la lumière au gré des heures et des saisons. […] »
Voila comment Raymond Voyat décrit le quotidien du maître dans l’étude qu’il a consacré au Maître Akéji : Le Sabre et le Pinceau, (réunissant certaines de ses œuvres et des poèmes tirés des grandes anthologies impériales des VIIIe, Xe et XIIIe siècles, des billets votifs des temples shintô et des enseignements des maîtres en arts martiaux.) On doit à Raymond Voyat, ce spécialiste de la culture japonaise, les rares informations biographiques sur ce personnage considéré comme « trésor vivant » au Japon.
Au printemps 2009, Hervé Desvaux s’est rendu dans l’ermitage d’Akéji situé sur les hauteurs de Kyoto. Ce privilège exceptionnel accordé à un photographe va donner à ce dernier l’idée de réaliser une partie de se tirages argentique en héliogravure au grain, technique de gravure de 1830. Le travail photographique de ce séjour hors du temps, a fait l’objet d’une publication dans la revue Polka, magazine de référence du photo-journalisme.
L’Énergie au bout du pinceau, Calligraphies d’Akeji Sumiyoshi

« L’Esprit de la montagne (Sudama) », été 1970
© Paris Musées / Musée Cernuschi © Akeji Sumiyoshi, Donn Machiko et François Raveau, 2022

Akeji, Le souffle de la montagne 「アケジ、山に棲む」
Au plus profond des montagnes, Akeji et Asako vivent à l’écart du monde. Parmi les animaux et les esprits de la nature, la vie s’écoule hors du temps. Artiste de renom, Maître Akeji descend d’une lignée de samouraïs, initié à la Voie du thé, du sabre et de la calligraphie. Cette immersion dans le monde d’un artiste en fusion avec la nature nous interroge sur nos manières d’être au monde.
> Samedi 19 novembre 2022 à 15h30 : Projection dans l’auditorium du musée Cernuschi
La projection du documentaire sera suivie d’une discussion avec les réalisateurs Mélanie Schaan et Corentin Leconte, et Manuela Moscatiello, responsable des collections japonaises au musée Cernuschi.
Durée : 72 min. Film présenté en VOSTF.
Entrée libre sur réservation à partir du 15 septembre (www.mcjp.fr).
Gratuit, sans réservation, accès libre dans la limite des places disponibles.
Coorganisation :

