2023 # Christian Marclay

Christian Marclay

L’art du détournement

du 16 nov. 2022 – 27 févr. 2023 au Centre George Pompidou

Pour la première fois depuis 2007, l’œuvre de Christian Marclay est largement présentée dans une exposition à Paris. Pensée sans suivre un parcours chronologique, mais selon un réseau d’affinités et d’échos déployant la logique de l’artiste multimédia, l’exposition mêle déjà-là, détournements et métamorphoses.

Le Centre Pompidou consacre jusqu’au 27 février une vaste exposition à l’artiste multimédia Christian Marclay, un génial jongleur de sons et d’images. Un panorama qui permet d’embrasser toute l’étendue de l’œuvre au carrefour du sonore et du visuel de cet artiste américano-suisse adepte du détournement. Depuis quarante ans, l’artiste multimedia Christian Marclay, musicien, plasticien et performer, ne cesse d’explorer avec malice le son, l’image, et leurs multiples connexions. Placé au départ sous le signe de l’esthétique punk et baignant dans le milieu musical expérimental, sous ascendance Duchamp/Warhol/John Cage, sont travail s’est d’abord focalisé sur l’univers sonore et en particulier sur le disque vinyle et sa pochette, qu’il a malaxés dans tous les sens et envisagés sous tous les angles. Il est devenu par ailleurs l’un des tout premiers « platinistes » (ou turntablists en anglais, qui ont fait des platines un instrument de musique à part entière) au début des années 80, lors de performances. Adepte du collage, du montage, de la fragmentation, de la reproduction et du détournement de l’existant, qu’il pratique en virtuose, cet artiste américano-suisse né en Californie en 1955 est un touche à tout qui ne s’interdit rien, y compris la provocation et l’humour. Mordu de cinéma tout autant que de sons, il a axé davantage au fil du temps ses recherches sur les arts visuels : photographie, vidéos, peintures, cyanotypes, lithographies.

Le disque vinyle

Au début des années 80, après avoir fait les Beaux-Arts de Genève puis le Massachusetts College of Art de Boston et avoir découvert le mouvement d’avant-garde Fluxus, le disque vinyle devient pour un temps un support essentiel du travail de Christian Marclay. Pour ses performances, il coupe, assemble et colle des morceaux de disques vinyles achetés pour quelques centimes, de sorte qu’ils puissent encore être joués, livrant d’étranges sculptures sonores. On en voit des dizaines dans la première salle de l’exposition sous le nom de Recycled Records. L’artiste arbore bientôt, pendue à son cou, une platine vinyle qu’il rebaptise Phonoguitar puisqu’il en joue comme d’un instrument à part entière lors de ses performances, notamment en hommage à Jimi Hendrix.

Endless Column, une colonne de disques vinyles empilés sur plus de trois mètres de hauteur, clin d’œil à la Colonne sans fin de Brancusi, témoigne encore de son obsession d’alors pour le disque et l’enregistrement avec ses « notions de répétition et d’infini ».

Les détournements de pochettes

Tandis qu’il accumule les disques vinyles qui sont souvent détruits lors de ses performances, les pochettes commencent à retenir elles aussi son attention, Les pochettes constituées de modifications de celle existantes – nouveaux titres, détournements, collages, arrachages. « Le réveil de l’imaginaire à la vue d’une pochette m’intriguait – ce mystère caché derrière la couverture et son lien potentiel avec la musique », explique-t-il dans le catalogue de l’exposition. La pochette, en tant qu’interprétation visuelle de la musique, devient à partir de la fin des années 80 et pour une dizaine d’années un fécond terrain d’expérimentations.

Puis viennent les spectaculaires et amusants Body Mix qui assemblent habilement plusieurs pochettes pour former des « chimères anatomiques » : ainsi, la tête de David Bowie de la pochette d’Aladdin Sane se prolonge d’un buste féminin et de cuisses gainées de porte-jarretelles, tandis que le buste et la tête de Michael Jackson pour Thriller se voient affublés de longues jambes de sirène chipées notamment à Roxy Music. On notera que Marclay est alors avec ces corps systématiquement dé-genrés en avance de quelques décennies sur la tendance, puisque ses visages de chanteuses, telles Diana Ross ou Grace Jones, sont montées quant à elles sur des torses de culturistes ultra virils.

À partir de la fin des années 90, la vidéo devient pour Christian Marclay un médium important qui lui permet de montrer la relation entre l’image et le son. On peut voir une dizaine de vidéos et d’installations vidéo à la rétrospective du Centre Pompidou. (Clock,le Lion d’Or du meilleur artiste à la Biennale de Venise, 2011, d’une durée de 24 heures est constitué de milliers d’extraits de films dans lesquels figure une indication d’heure (une montre, une horloge, un réveil), assemblés avec une précision si maniaque que la vidéo est réglée pour donner toujours l’heure juste au spectateur lors de sa diffusion. Une expérience inoubliable représentative de son esprit et de son travail de collage, hautement addictif et hypnotique.

Onomatopées, BD et mangas

Dans sa recherche sur la visualisation du son, Christian Marclay puise depuis 1989 dans le riche réservoir en motifs et surtout en onomatopées que sont les BD et les mangas. La série de collages de bandes dessinées sur papier avec ses OoooOOOoooo, Aaaaaaaahh, Ka-Boom et autres Kraashh, et les figures monstrueuses Face (Ecorché) et Untitled (Blue Electric) formées d’onomatopées. Ces collages mènent à la série Actions dans laquelle des onomatopées évoquant le liquide (en anglais) telles Froosh, Sploosh ou Plish Plop, ont guidé ses gestes picturaux à la peinture acrylique, à coups de brosse, éponges et éclaboussures.

  • 2023-02 Exposition Christian Marclay au Centre George Pompidou (Öznur Baycan / AAPERTURA)
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  • 2023-02 Exposition Christian Marclay au Centre George Pompidou (Öznur Baycan / AAPERTURA)
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  • 2023-02 Exposition Christian Marclay au Centre George Pompidou (Öznur Baycan / AAPERTURA)
  • 2023-02 Exposition Christian Marclay au Centre George Pompidou (Öznur Baycan / AAPERTURA)

> Centre George Pompidou, Exposition Christian Marclay