L’Usage des formes, Artisans d’art et artistes
À l’occasion des Journées Européennes des Métiers d’Art, les 27, 28 et 29 mars, Palais du Tokyo
Exposition conçue grâce au partenariat avec la Fondation Bettencourt Schueller et présentée en résonnance avec les Journées Européennes des Métiers d’Art.
Avec : Abdou Fataï ABIOLA, Georges ALLORO, Jean-Marie APPRIOU, Jean-Michel APPRIOU, ARCA, Marc AUREL, Bernard et François BASCHET, Eric BENQUÉ, Berger&Berger, Camille BLATRIX, BLESS, Gérard BORDE, Bruno BOTELLA, Linda BROTHWELL, Jacques CARELMAN, Nicolas CECCALDI, Giorgio DE CHIRICO, Gérard DESQUAND, Aleksandra DOMANOVIC, Charles EAMES, Alexandre ECHASSERIAU, Pierre EMM & Johan DA SILVEIRA & Piotr WIDELKA, Nicolas FARINOTTI, Pierre FAVRE, GLASS FABRIK, GRAMAZIO KOHLER RESEARCH- ETH Zurich, Constance GUISSET, Frédéric HAMEL, Michael HANSMEYER, Bernard HEIDSIECK, Yngve HOLEN, Franck JALLEAU, Thomas JAMES, Emmanuel JOUSSOT, François JUNOD, Gaël LANGEVIN, Nathanaël LE BERRE, Guillaume LEBLON, Xavier LE NORMAND, LEZARD GRAPHIQUE, Emmanuelle LAINÉ, Marie LUND, Jean-Paul MAHÉ, Benoît MAIRE, Christophe MANKA, Maurice MARINOT, Kristin MCKIRDY, Christophe MICHEL, Christian MORETTI, Jean-Luc MOULÈNE, Sébastien NEDJAR, André NICOLAS, Jean Antoine NOLLET, Giuseppe PENONE, Daniel POMMEREULLE, François-Xavier RICHARD, Frédéric RICHARD, David ROSENBLUM, Bernard SOLON, Ettore SOTTSASS, Robert STADLER, SYNDICAT, Richard TUTTLE
L’exposition L’Usage des formes explore l’ingéniosité humaine et la relation passionnée que les créateurs entretiennent avec leurs outils, en abordant l’instrument comme un élément fondamental du rapport de l’homme au monde. Faisant dialoguer artisans d’art et artistes, l’exposition rassemble les métiers d’art, le design, les arts plastiques et l’architecture dans une scénographie conçue par le designer Robert Stadler et réalisée en collaboration avec des artisans d’art.
Le début du parcours invite à plonger dans l’univers de l’atelier. Au sein de cette fabrique, l’outil se donne à voir comme une incarnation de l’Histoire, en ce qu’il correspond fondamentalement à la transmission ou réécriture de la pratique qui lui est associée. L’exposition aborde ensuite la notion de prise en main de l’outil. L’objet technique est l’instrument de cette préhension qui permet de mettre l’homme en contact avec le monde. Telle une prothèse, l’outil est précisément cette extension du corps qui permet à l’homme d’interagir avec son environnement et de passer ainsi de l’état de nature à l’état de culture. Apprendre à manipuler un outil révèle les propriétés cachées de la matière. L’outil, par conséquent, est un objet qui permet d’extraire de l’information, de mesurer et de quantifier le réel et d’opérer des croisements fructueux entre la science, la technologie et l’artisanat. L’exposition se clôt sur la double dimension symbolique – voire magique – et utilitaire de l’outil : à l’instar du compas des Compagnons du Devoir, devenu symbole philosophique de la Franc-maçonnerie, ou encore du dodécaèdre gallo-romain, mystérieux objet de divination, présentés dans cette section. Par leur préciosité ou par le sens dont ils ont été investis, ces objets, à l’origine simples instruments, deviennent de puissants symboles de l’humanité et des vecteurs de contemplation.
L’exposition par son commissaire, Gallien Déjean
En 1930, l’ethnologue Marcel Griaule publie dans la revue Documents[Documents a été fondé en 1929 par l’écrivain Georges Bataille, l’historien d’art Carl Einstein et le muséologue Georges-Henri Rivière, inventeur du Musée de l’Homme. Malgré une longévité restreinte, cette revue a eu un rôle fondamental dans le rapprochement entre l’esthétique et les sciences sociales. Mêlant ethnographie, avant-garde et culture populaire, Documents a été le creuset d’une pensée décloisonnante alimentée par des contributeurs prestigieux (Giorgio de Chirico, Salvador Dalí, Robert Desnos, Max Ernst, Marcel Griaule, Michel Leiris, Marcel Mauss, Raymond Queneau, etc.).] un article intitulé « Poterie » dans lequel il dénonce les archéologues et les esthètes qui admirent, dit-il, « la forme d’une anse » mais se gardent bien « d’étudier la position de l’homme qui boit ». La forme de chaque objet, dans son contexte d’émergence, est liée à un usage – qu’il s’agisse d’un ustensile, d’un objet d’art appliqué ou même d’une œuvre d’art.
Dans ce texte, Griaule déplore le processus de décontextualisation que l’on fait subir aux objets lorsqu’ils intègrent le musée pour acquérir une valeur esthétique. Dévitalisés de leur fonction d’usage dans cette enceinte sacrée, ils deviennent des objets de contemplation qui n’ont pour seule justification que la classification qui les subsume.
« L’Usage des formes » s’intéresse non seulement à « l’homme qui boit » mais également à celui qui, parce qu’il boit, fabrique une anse. L’exposition regroupe des objets et des œuvres issues d’époques et de domaines variés : métiers d’art[2], arts plastiques, design et architecture. Chacun de ces artefacts témoigne d’une valeur d’usage. La plupart appartient à la catégorie des instruments techniques dont le champ d’action est infini : certains servent à transformer la matière, d’autres à révéler l’invisible, extraire des données, produire de l’information ou communiquer. Ils prolongent nos organes dans leur fonction d’appréhension du monde. Selon le philosophe Gilbert Simondon, les instruments techniques sont des êtres « allagmatiques », c’est-à-dire des éléments d’échange entre l’homme et son environnement ; de cet échange naît la culture.
Deux entités complémentaires incarnent le rapport à l’outil. L’homo faber construit des instruments pour effectuer le transfert de la nature à la culture. L’homo ludens joue à détourner les outils de production et les instruments de la connaissance créés par l’homo faber afin de faire surgir de nouvelles possibilités. Parfois, ces deux attitudes coexistent au sein de la pratique d’un même créateur. En exposant les outils et les échantillons prélevés dans les ateliers d’artisans d’art, mis en regard avec ceux des plasticiens et des designers, l’exposition « L’Usage des formes » met en scène ces deux conceptions entrelacées de l’invention, et la manière dont les gestes techniques sont porteurs de sens et de connaissance.
Dans Les Gestes, le philosophe Vilém Flusser décrit le moment où, à l’issue d’une production, « les mains se retirent de l’objet, ouvrent leurs paumes en un angle large et laissent glisser l’objet dans le contexte de la culture […], non quand elles sont satisfaites de l’œuvre, mais quand elles savent que toute continuation du geste de faire serait insignifiante pour l’œuvre ». Ce geste est aussi celui du don, affirme-t-il. C’est « le geste d’exposer » que « L’Usage des formes » met en scène au sein d’un espace scénographique où flotte encore la survivance de l’usage des formes présentées.
Décompression, Collectif de jeunes artistes ukrainiens
20 avril – 8 mai 2015, Eglise Saint-Merry
En invitant du 20 avril au 8 mai 2015 un collectif de quinze jeunes artistes ukrainiens, « Ukraine scène libre », Saint-Merry élargit la fonction de l’église comme lieu de rassemblement et reconnaît la dimension spirituelle présente dans une démarche politique comme celle de ce peuple qui, depuis la Révolution orange en 2004 et surtout les évènements de l’hiver 2013-2014, à Maïdan, cherche de l’air après avoir vécu dans les ténèbres profondes de l’oppression idéologique.
« Décompression » est une exposition romantique, puissante, proliférante, aux racines du politique qui donne à Saint-Merry un visage temporaire surprenant. Elle ne relève pas du documentaire sur les évènements passés ou en cours. Les artistes ukrainiens rassemblés par les organisateurs « Souffle collectif » expriment sur un mode artistique ce qui travaille en profondeur toute une société en gestation, mais menacée et amputée d’une partie de son territoire par le nationalisme totalitaire russe. Saint-Merry s’est ouvert à l’esprit de Maïdan. « Décompression » est une exposition politique, dans la mesure où elle parle d’un peuple en danger qui remonte à la démocratie dans la plus grande urgence, qui se forme une conscience collective et construit des manières de vivre ensemble mais doit s’arrêter dans ses avancées. Il s’agit aussi d’une exposition spirituelle, car les artistes expriment ce qui anime tout le corps social dont ils font partie et le transmettent en utilisant les médiums les plus divers.
Le titre de l’exposition et le commentaire qu’en fait Darya Koltsova, artiste et commissaire, sont expressifs de cette mise en scène d’un fort désir collectif de vie et de liberté.
Décompression : état dangereux pour la vie humaine qui survient à des personnes descendues profond ou longtemps dans l’eau et qui remontent trop vite. Dans cet état, le sang, de fait, peut « bouillir ». Les Ukrainiens, au cours des dernières années, ont été dans une atmosphère politique étouffante et n’avaient pas d’autre choix que de « remonter à la surface » pour une bouffée d’air frais. Cependant, cette remontée fut trop rapide et maintenant l’Ukraine doit s’arrêter de temps en temps, en s’adaptant aux nouvelles conditions : « expirer les gaz résiduels du corps du pays. » Le projet «Décompression» – est une «conversation» philosophique sur la révolution de la dignité, la peur et les espoirs romantiques, la douleur et l’unité.
Palaisrama : « Modernité : art de vivre, art dans la vie »
Palais De Tokyo, le samedi 16 mai 2015
Comment le concept de modernité a-t-il évolué au fil des différents projets architecturaux du Palais de Tokyo ? De la proposition des années 1930 aux interventions artistiques toutes récentes sur le bâtiment, en passant par la notion d’esthétique relationnelle, apprenez à décrypter le parti pris esthétique souvent radical de cette institution installée dans une friche muséale. Palaisrama : « Quand la lumière entre dans le musée »
Des salles d’exposition baignées par la lumière naturelle : un véritable parti pris muséographique qui a participer à la construction de l’identité de l’institution. Cette qualité architecturale reconnue dès l’inauguration du Palais de Tokyo en 1937 n’a pas été une constante au fil des décennies. Découvrez la singulière histoire du bâtiment en suivant les rayons de lumière, jusqu’à l’obscur niveau 0…Palaisrama : « Une certaine idée du décor » Cette année, les interventions d’artistes sur le bâtiment remettent au goût du jour la notion de décor. Abandonnée, pour ainsi dire, par les architectes Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal dans leur conception minimale de l’architecture, l’idée de décor fut déjà largement discutée pour le projet d’origine. Ce parcours de visite invitera votre regard à marquer des temps de pause et vous fera parfois découvrir les œuvres cachées de la programmation.
> PALAISRAMA au PALAIS DE TOKYO