CORPORATE / SAMBUC – LA COLLECTION EDISOLUM L’Eau-forte, N 9 Etoffes
Tisser est entrecroiser des fils pour former une toile. Le tissu, le texte sont de « technique », la tékhnê grecque du travail du bois ou de la laine. Le nom « architecte » nous a conservé une vieille origine de l’artifice dans le verbe grec στέγω, « couvrir, protéger ». L’art, l’articulation qui entrecroise solives et ficelles représente la mise au monde de ce qui protège (le toit, l’habit). « Étoffer » signifie aujourd’hui encore fournir, habiller, garnir. Par l’étoffe le corps d’hommes ou de femmes prend de l’ampleur, se fourre, se grossit en même temps qu’il protège sa peau du froid que l’absence presque totale de pilosité, sauf à quelques endroits (sous le menton, aux aisselles, aux parties), mord l’hiver venu. Sous les étoffes nous sommes en hiver comme les plantes que l’on abrite en serres. C’est encore un repli à la sensibilité, une façon de protéger l’à-fleur-de-peau des nerfs que l’activité humaine et le commerce de la grossièreté rougit.
Le papier des cloisons japonaises, ou la soie, ou la laine des tapisseries sont ces parures de la sensibilité dans l’hiver du monde.
> Revue L’Eau-forte, Ed.Edisolum
photos © Öznur Baycan, AAPERTURA, 2014, Paris